Page 68 - VI - Les Exilés
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LES EXILÉS


                - Oui, répondit-il en hochant fébrilement la tête.
                Le garde examina de nouveau la carte d’identité.
                - Nationalité française, dit-il avec un mépris manifeste.
                Puis, tendant les papiers d’Armand dans le vide, il attendit que l’un
            des deux officiers en faction devant la porte vienne les récupérer.
                - Profession ? demanda-t-il avec un fort accent.
                Armand répondit en allemand, bien que son vocabulaire soit un
            peu limité.
                - Je suis chirurgien.
                Le garde se tut.
                - Nous avons un travail à vous confier, reprit le garde en faisant les
            cent pas devant Armand. Une mission au service de l’Allemagne Nazie
            et de son führer.
                Il  commença  alors  à  expliquer  en  quoi  consisterait  le  travail
            d’Armand. Lorsqu’il termina son long monologue, il attendit une
            réponse. Armand ne dit rien. À trente-deux ans, et chirurgien depuis
            moins  d’un  an,  il  n’aurait  jamais  pensé  devoir  travailler  pour  les
            hommes qui tenaient son pays avec le couteau sous la gorge…
                Le garde n’interpréta pas le silence d’Armand comme une réponse
            satisfaisante. Il sortit son arme et la pointa droit sur le jeune chirurgien.
            Il s’avança pour venir poser le canon sur son front humide de sueur. On
            avait beau être en plein hiver, une chaleur insupportable régnait dans
            cette pièce. Le silence persista. Le garde s’apprêta à tirer. Armand finit
            par accepter. Comme si toute autre réponse l’aurait étonné, le garde se
            mit à sourire, satisfait. Il baissa alors son arme. Armand ignorait dans
            quoi il venait de s’embarquer, mais cela ne présageait rien de bon. Une
            vague angoisse commença à l’empoigner aux tripes. Sa profession de
            chirurgien  n’y  était  pas pour rien.  Armand n’avait  pas été choisi par
            hasard.



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